Dans la fabrication des produits stériles, la question n’est jamais de savoir si une contamination peut se produire, mais plutôt comment démontrer qu’elle ne s’est pas produite. C’est là qu’intervient le test de validation par media fill, aussi appelé simulation aseptique.
Ce test, exigé par toutes les autorités réglementaires (FDA, EMA, OMS, PIC/S), consiste à remplacer les produits stériles pharmaceutiques par un milieu nutritif de culture et à reproduire fidèlement chaque étape du procédé de fabrication stérile. À travers cette simulation grandeur nature, l’industriel apporte la preuve que son procédé, ses équipements et ses opérateurs travaillent dans des conditions réellement aseptiques.

Le principe :
Le media fill suit exactement les mêmes étapes qu’un lot commercial : préparation du milieu, remplissage, bouchage, conditionnement. La seule différence est que l’on n’utilise pas le médicament, mais un milieu de culture comme le Soybean Casein Digest Medium (SCDM), choisi pour sa capacité à faire pousser un large spectre de micro-organismes.
Après le remplissage, les unités sont incubées à 20–25 °C et à 30–35 °C. Si aucun flacon, seringue ou ampoule ne montre de croissance, le procédé est validé. Dans le cas contraire, chaque contamination détectée devient une alerte qui doit être investiguée.

Les exigences du remplissage aseptique des produits stériles
Un media fill ne se limite pas à un simple exercice de conformité. Il répond à plusieurs enjeux stratégiques :
- Démonstration de stérilité : prouver que le procédé aseptique peut garantir la sécurité du patient.
 - Évaluation des risques : tester les étapes sensibles comme les changements d’opérateurs, les interventions manuelles, ou encore les redémarrages après arrêt de ligne.
 - Robustesse du procédé : mettre en évidence les points faibles, qu’il s’agisse d’un problème technique, organisationnel ou humain.
 - Formation des opérateurs : les gestes aseptiques sont testés en situation réelle, et leur importance devient tangible.
 
Comment concevoir un media fill représentatif
Un media fill doit refléter la réalité industrielle, mais aussi inclure des pire cas pour pousser le système à ses limites :
- Intégrer le nombre maximum d’opérateurs dans la salle.
 - Simuler des démontages et remontages de pièces critiques.
 - Prévoir des pauses et changements d’équipes.
 - Allonger la durée du remplissage pour représenter des scénarios extrêmes.
 - Simuler des arrêts imprévus comme une panne électrique.
 
La taille du lot doit elle aussi être représentative : les recommandations imposent généralement 5 000 à 10 000 unités minimum.
Produits stériles et Media Fill: L’importance de la préparation
Pour réussir un media fill, certaines conditions doivent être réunies en amont :
- Des locaux qualifiés (HVAC, pressions différentielles, flux d’air laminaire validés).
 - Des utilités critiques maîtrisées : eau pour préparations injectables, air comprimé, vapeur propre.
 - Des procédures robustes de surveillance environnementale et de suivi opérateur (empreintes de gants, monitoring particulaire et microbiologique).
 - Des opérateurs formés et conscients que chaque geste est évalué.
 - Un test de promotion de croissance (GPT) validant que le milieu est capable de révéler toute contamination.
 
Interprétation des résultats
Les critères d’acceptation sont stricts :
- Moins de 5 000 unités : aucune contamination n’est tolérée.
 - 5 000 à 10 000 unités : une unité contaminée peut déclencher une enquête, deux imposent une revalidation.
 - Plus de 10 000 unités : un cas = enquête, deux cas = échec du test et nécessité de répéter trois media fills consécutifs.
 
Chaque contamination doit être identifiée (identification de l’espèce du contaminant). Ce diagnostic est essentiel pour déterminer l’origine (environnementale, opérateur, surface, matériel) et mettre en place un plan CAPA adapté.
Que faire en cas d’échec ?
Un media fill échoué n’est pas une simple non-conformité : c’est un signal fort qu’un maillon de la chaîne aseptique n’est pas maîtrisé. L’entreprise doit immédiatement :
- Suspendre la production concernée.
 - Mener une enquête approfondie.
 - Identifier le micro-organisme et sa source probable.
 - Mettre en place des actions correctives et préventives.
 - Revalider le procédé sans échec.
 
C’est une démarche exigeante, mais indispensable.
Le media fill est à la fois un test réglementaire, une preuve de maîtrise et un outil de formation. Il rappelle une vérité simple : en production aseptique, rien ne doit être laissé au hasard. Chaque opérateur, chaque procédure, chaque équipement joue un rôle. Réussir un media fill, ce n’est pas seulement répondre à une exigence ; c’est démontrer, de manière tangible, que la sécurité du patient reste au cœur de toutes les opérations.
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